La Blonde et moi

dimanche 11 mars 2018, 12h00

Salle Georges Franju

12h00 13h40 (97 min)

La Blonde et moi The Girl Can't Help It
Frank Tashlin
Etats-Unis / 1956 / 97 min / DCP / VOSTF
D'après Garson Kanin.

Avec Tom Ewell, Jayne Mansfield, Edmond O'Brien.

Le mafieux Marty Murdock engage Tom Miller, un imprésario alcoolique, pour faire de sa petite amie Jerri Jordan une vedette de la chanson.

Jerri Jordan possède le pouvoir de détraquer l’intensité hormonale masculine et avec elle, de tordre les lois physiques du monde. En effet, le corps de Jayne Mansfield ressemble à une Marilyn Monroe regonflée et magnifiée comme une sculpture de Jeff Koons, et c’est là aussi que Frank Tashlin exprime son héritage du cartoon américain. À propos du tour de poitrine de Mansfield, Frank Tashlin dira à Peter Bogdanovich que ce fétichisme des seins reflète « l’immaturité des hommes américains (…) Nous n’aimons pas les grands pieds ou les grandes oreilles mais nous faisons d’une femme une idole parce qu’elle a des seins déformés ». Or le comique « tashlinesque », pour reprendre l’expression de Godard, a trait à un monde déformable dans une sorte d’hystérie collective, où la perte de sens est la norme. En préambule, Tom Ewell va jusqu’à transformer la nature du medium en repoussant avec ses mains les limites du cadre académique 1.37 en faveur du CinemaScope et ajoute de la couleur en un simple claquement de doigts. La déformation de l’image devient ici la nouvelle norme du cinéma. L’un des sens de « tashlinesque », selon le critique Jonathan Rosenbaum, correspond à un « modernisme vulgaire » où finalement les conditions de création du film deviennent aussi importantes que l’histoire. Ewell ajoute en introduction que « l’histoire est à propos de la musique. Non pas la musique d’il y a longtemps mais celle qui exprime la culture, le raffinement, et la grâce du temps présent ». Bien entendu, le rock’n’roll se trouve aux antipodes de cette définition, il est au premier plan en tant qu’art populaire brut mais surtout en tant qu’industrie, où finalement on porte plus d’attention au packaging : à l’image de ce cri d’alarme poussé par Jerri qui fait un succès de la chanson de Fats Murdock.
En plus d’être l’une des plus grandes comédies de Tashlin, sans Jerry Lewis, La Blonde et Moi demeure encore aujourd’hui l’un des plus beaux documents sur le rock’n’roll des années 1950 avec l’apparition de chanteurs aussi iconiques que Little Richard, Fats Domino, Gene Vincent et bien d’autres encore.

Céline Ruivo