Mon vingtième siècle

Mon vingtième siècle Az én XX. századom

Ildikó Enyedi
Hongrie-Allemagne-Cuba / 1988 / 97 min

Avec Oleg Yankovski, Dorota Segda, Paulus Manker.

Deux jumelles voient le jour à Budapest. Ayant perdu leurs parents, elles sont séparées. Plus tard, en 1900, l'une d'elle est devenue une femme fatale, l'autre anarchiste. Sans le savoir, elles ont une relation avec le même homme.

Restauré intégralement en 4K en 2017 à partir du négatif caméra et de la bande magnétique sonore d'origine, par les Archives Nationales du Film de la Hongrie et le Hungarian FilmLab. Étalonnage numérique supervisé par Tibor Máthé.

En avant-première de sa ressortie en salles le 14 mars 2018 par Malavida.


Avec pour intention initiale l’évocation des deux décennies qui précédent et préfigurent le XXè siècle, Ildikó Enyedi signe un premier film remarquable, onirique et drôle, où l’imaginaire côtoie le réel.
Les inventions et les progrès techniques – l’incroyable démonstration de l’ampoule électrique par Edison en 1879 à Menlo Park, l’essor de l’aviation, les télécommunications, le cinématographe – apparaissent comme des moments magiques, miraculeux ; ils annoncent la promesse de tous les possibles et une foi en l’humanité. Le potentiel sera pourtant détourné et détruit par le cataclysme des deux guerres mondiales. « On a oublié les ouvertures extraordinaires offertes par les grandes découvertes techniques, non seulement matériellement mais surtout dans l’esprit. Il régnait alors un mode de pensée très ouvert, très dynamique, confiant dans la force de l’individu, dans le pouvoir de l’imagination », confiait la réalisatrice. Façonné tel une mosaïque, le récit assemble ces fragments d’innovations merveilleuses à l’histoire de deux sœurs jumelles nées à Budapest, deux orphelines séparées à l’enfance. À vingt ans, contraintes de s’inventer un rôle pour exister (deux personnalités opposées mais complémentaires), elles se croisent, fréquentent le même homme, et tentent inconsciemment de se réunir tant leur complétude leur fait individuellement défaut. La sublime photographie en noir et blanc conçue par Tibor Máthé éclaire artificiellement la quasi totalité des scènes, sculpte et enveloppe chaque instant d’une certaine abstraction. La lumière, comme une promesse au XXè siècle, et l’admiration qu’Ildikó Enyedi porte à Griffith et Méliès sont palpables.

Présenté au Festival de Cannes en 1989 dans la section « Un certain regard », le film remporte la Caméra d’or et suscite l’admiration de la critique.

Samantha Leroy