Laurel et Hardy

Du 9 décembre 2009 au 11 janvier 2010

Les deux compères

Laurel et Hardy ne forment qu’une entité, un seul corps divisé en deux. Un gros et un maigre. Un joufflu qui roule les mécaniques, et un lunaire. Le maigre, Stan Laurel, celui qui fait souvent la moue et parfois pleurniche comme un gosse, est né le 18 juin 1890 à Cumbria, en Angleterre. Des deux c’est lui le plus poète. Quant au gros, Oliver Hardy, il est né deux ans plus tard à Harlem, Georgie, USA. Chacun de son côté a fait un début de carrière en solo avant de rencontrer l’autre. Leur association sous la marque « Laurel et Hardy » sera l’une des plus fécondes de toute l’histoire du burlesque. On dit qu’à la mort de Hardy, le 7 août 1957, Laurel ne s’en remit pas au point de sombrer dans une grave dépression. Il est mort lui-même le 23 février 1965 à Santa Monica après une vie bien remplie. Qu’est-ce qui fait que leur alliance ait à ce point si bien fonctionné ? Pour répondre, il suffit de revoir quelques-uns de leurs films. Piochons au hasard.

Les Deux musiciens / Below Zero (1930)

Le duo joue de la musique devant une maison, alors que la neige tombe. Dépités, les doigts gelés, ils s’étonnent que les passants ne s’arrêtent pas et ne leur donnent aucune pièce. Le gag, comme souvent, vient de leur retard à l’allumage : la maison devant laquelle ils stationnent est réservée à des sourds muets. Ils s’installent plus loin, mais les catastrophes s’enchaînent. Avec Laurel et Hardy, le pire n’est jamais atteint. Suit l’épisode du portefeuille trouvé dans la neige, appartenant à un policier que nos deux compères convient généreusement à déjeuner. On devine la suite. Ce qui frappe c’est la pureté formelle, le cadrage (le jeu avec le hors-champ) et le bruitage (c’est du cinéma sonore mais qui porte avec joie les traces du muet). Du grand Art.

Les Deux vagabonds / Scram ! (1932)

Au tribunal, Laurel et Hardy sont accusés de vagabondage par un juge qui les condamne à ne faire qu’une heure de prison, tellement celle-ci est déjà pleine. Dehors, un riche homme bien habillé perd sa clé de voiture, qui tombe à travers une grille sur le trottoir. L’homme est ivre mort. Jeux d’équilibre, poursuite avec un policier (figure obligée du burlesque), acrobatie et chutes. Plus tard, une scène de fou rire incroyable entre les deux compères et une femme réveillée la nuit dans une maison où Laurel et Hardy se sont introduits. Rendue ivre, Mme de Beaumont n’est autre que l’épouse du juge…

The Bohemian Girl / La Bohémienne (1936)

Le film commence comme une comédie musicale. Des gitans chantent et installent leur campement sur les terres d’un comte qui vit dans son château entouré de sa garde. Décors et costumes d’époque, tout est parfait. Le comte, apprenant que les bohémiens campent sur ses terres, exige leur départ. Ça chante et ça danse, tandis que Laurel et Hardy épluchent des patates. Laurel surprend la femme de Hardy en train d’embrasser son amant : « Il n’y a rien de mal, lui dit Hardy, il faut avoir les idées larges ». Laurel et Hardy sont si proches, si fusionnels, qu’il est impossible que l’un puisse s’éloigner de l’autre sous prétexte d’être marié. La nuit venue, les deux coquins s’en vont au village faire leurs larcins. Avec un talent inimitable fait de maladresse et de roublardise, ils dépouillent un aristocrate de son argent. Mais, plus qu’à voler les autres, Laurel et Hardy passent leur temps à se voler l’un l’autre à tour de rôle. Leur désir n’est pas de posséder, mais de déposséder l’autre du peu qu’il a, dans une sorte de rivalité enfantine. Les choses sérieuses se passent au second plan du film, quand l’amant de la femme de Hardy kidnappe la fillette du comte, Arline. Celle-ci est présentée à Hardy comme sa fille, ce qu’il accepte avec un naturel déroutant. De la même manière qu’il est incongru que Hardy soit marié, il est inenvisageable qu’il soit père, ou alors par une sorte de miracle. Douze ans plus tard, Arline a grandi et rêve en chantant qu’elle est une princesse. Pendant que Laurel s’emploie à remplir des bouteilles de vin (scène hilarante et muette digne d’un mime de génie), Arline s’en va du côté du château où elle entend la voix du comte chanter sa tristesse d’avoir perdu sa fille. Prise pour une bohémienne, la jeune fille est arrêtée. Hardy vient chercher le renfort de Laurel, complètement ivre. Au moment où Arline est menacée de se faire fouetter, son père reconnaît le pendentif qu’il lui avait donné lorsqu’elle était enfant. Tout finit pour le mieux. Laurel et Hardy, malgré eux, créent les conditions pour que l’harmonie revienne.

Bons pour le service / Bonnie Scotland (1935)

Stanley MacLaurel est censé hériter d’un grand-père écossais qu’il n’a pas connu. Les deux compères débarquent dans un village d’Écosse pour découvrir que l’héritage se limite à une cornemuse et une bague à tabac. Une scène incroyable, où leur génie de la domesticité est à l’œuvre. Dans la chambre d’hôtel qu’ils n’ont pas les moyens de payer, Laurel revient avec un morceau de morue qu’il a échangé contre leurs manteaux. Comment cuire le poisson ? À l’aide d’une bougie placée sous le sommier du matelas, celui-ci servant de grill. Pendant que Laurel surveille la cuisson, Hardy met la table en se servant des tiroirs d’une commode. La catastrophe ne fera qu’empirer. Laurel et Hardy sont les rois de la vie domestique. Partout où ils passent, rien ne survit intact. Leur capacité de destruction est infinie. Enrôlés dans l’armée écossaise, les deux compères se retrouvent en Inde, tandis que se déroule la romance entre une riche héritière et son fiancé. Laurel et Hardy deviennent malgré eux des héros.

Chaque film avec Laurel et Hardy raconte le processus qui mène à la résolution harmonieuse d’une histoire qui ne les concerne pas, tandis qu’eux s’emmêlent les pinceaux du fait de leur incurable maladresse. Mais ce qu’il y a d’admirable, c’est leur sens de la chorégraphie, leur souplesse physique, leur capacité à prendre des coups et de rebondir. Et surtout d’occuper tout l’espace. Leur obscénité est donnée comme naturelle (ils dorment dans la même chambre et dans le même lit) : ils sont l’un l’autre les deux médailles d’une même pièce. Que l’on se tourne vers ou vers l’autre, l’on rit car ces deux nigauds ont du génie.

Serge Toubiana

Les films

A Laurel and Hardy Cartoon
Joseph Barbera, William Hanna , 1966
Sa 19 déc 15h00   GF
La Bataille du siècle
Clyde Bruckman, Hal Roach , 1927
Œil pour œil
James W. Horne , 1929
Son altesse royale
Lewis R. Foster , 1929
Vive la liberté
Leo McCarey , 1929
Les Bons petits diables
James Parrott , 1930
Me 9 déc 21h00   HL
Les Deux détectives
Fred Guiol , 1927
Flying elephants
Fred J. Butler, Hal Roach , 1928
Sugar Daddies
Fred Guiol, Leo McCarey , 1927
Call of the Cuckoos
Clyde Bruckman , 1927
Ve 11 déc 19h30   GF
Drôles de bottes
James Parrott , 1929
Les Carottiers
James W. Horne , 1931
Les Bons petits diables
James Parrott , 1930
Me 16 déc 19h30   GF
Jitterbugs
Malcolm St. Clair , 1943
Je 31 déc 17h30   GF
Les Joies du mariage
James Parrott , 1933
Their first mistake
George Marshall , 1932
Towed in a hole
George Marshall , 1932
Sa 19 déc 21h30   GF
Laurel et Hardy constructeurs
Clyde Bruckman , 1928
From Soup to Nuts
Edgar Kennedy , 1928
Ton cor est à toi
Edgar Kennedy , 1928
Their Purple Moment
James Parrott , 1928
Sa 12 déc 19h30   GF
The Lucky dog
Jess Robbins , 1921
Duck Soup
Fred Guiol , 1927
Slipping Wives
Fred Guiol , 1927
Je 10 déc 17h30   HL
Œil pour œil
James W. Horne , 1929
Son altesse royale
Lewis R. Foster , 1929
Berth marks
Lewis R. Foster , 1929
La Flotte est dans le lac
Lewis R. Foster , 1929
Di 13 déc 21h30   GF
On a gaffé
Leo McCarey , 1928
Vive la liberté
Leo McCarey , 1929
Y'a erreur !
Leo McCarey , 1929
C'est ma femme
Lloyd French , 1929
Di 13 déc 19h30   GF
One Good Turn
James W. Horne , 1931
Les Deux vagabonds
Ray McCarey , 1932
Maison de tout repos
James Parrott , 1932
The Tree in a test tube
Charles McDonald , 1943
Lu 28 déc 19h30   GF
Our Wife
James W. Horne , 1931
Quelle bringue
James Parrott , 1930
Chickens Come Home
James W. Horne , 1931
Come Clean
James W. Horne , 1931
Je 17 déc 19h30   GF
Pick a Star
Edward Sedgwick , 1936
The Bullfighters
Mal St. Clair , 1945
Di 10 jan 21h30   GF
Sous les verrous
James Parrott , 1930
Any Old Port !
James W. Horne , 1932
Je 17 déc 21h30   GF
They Go Boom
James Parrott , 1929
Une saisie mouvementée
Lewis R. Foster , 1929
Angora Love
Lewis R. Foster , 1929
Unaccustomed As We Are
Lewis R. Foster , 1929
Lu 14 déc 14h30   JE
Un jour, une bergère
Gus Meins, Charley Rogers , 1934
Ve 18 déc 14h30   GF
Une partie de campagne
James Parrott , 1929
Une nuit agitée
James Parrott , 1930
The Hoose-Gow
James Parrott , 1929
Les Bricoleurs
James Parrott , 1930
Di 12 déc 15h00   GF
Zenobia
Gordon Douglas , 1938
Sa 2 jan 15h00   GF

Rencontres et conférences

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