Centenaire Universal

Du 5 décembre 2012 au 4 mars 2013

Universal : cent ans et cent films

Il y a toujours quelque chose de particulièrement fécond et excitant à parcourir l’histoire d’un studio hollywoodien. Traverser plusieurs décennies en suivant l’évolution d’une entreprise de production, au moyen d’un passage en revue sélectif des œuvres qui en furent le produit, contient un pouvoir cognitif très intense. Si l’économie, détermination première, et les stratégies qu’elle impose, apparaissent ainsi plus aisément à travers ce prisme particulier, la question esthétique, intimement mêlée à des déterminations exogènes, a priori, à la dimension « artistique » du cinéma, n’apparaît certainement pas absente d’un tel point de vue.

La plus grande des petites Major Companies

Universal fut considéré comme la plus grande des « petites » major companies. Ce qualificatif, le studio le doit d’abord à l’ampleur du volume de sa production, mais surtout au fait qu’il ne possédait pas de circuits de salles de cinéma. L’intégration verticale totale qui fut, pendant des décennies, le principe adopté par les plus importantes compagnies hollywoodiennes, s’arrêtait à la distribution pour Universal. Cette particularité allait, durant plusieurs décennies, avant que la réglementation anti-trust ne contraigne en 1947 les majors à se débarrasser de leurs salles, expliquer les choix tactiques du studio.

À ses débuts, l’histoire d’Universal s’est pourtant confondue avec celle des compagnies qui allaient contribuer à la création d’Hollywood comme modèle de divertissement de masse, au début du XXe siècle. Carl Laemmle, fondateur du studio, n’est après tout qu’un de ces immigrés juifs venus d’Europe, qui découvrent, dans l’opposition au monopole Edison et dans l’invention d’une industrie du cinéma, un moyen de faire fortune dans le Nouveau Monde. Mais l’histoire d’Universal aura ensuite été celle d’un studio fragile, instable, malmené par les aléas de l’économie, de la gestion et des carrières commerciales incertaines des films. À Carl Laemmle ont succédé, durant dix décennies, différents dirigeants, tous tiraillés entre les prescriptions d’une gestion saine et la nécessité de prendre des paris inhérents à toute entreprise culturelle. Ainsi, n’aura-t-il pas été possible, contrairement à d’autres compagnies, d’identifier le studio avec un prestigieux et charismatique patron, aucun équivalent de ce que furent Jack Warner pour la Warner, Louis B. Mayer pour la MGM, Darryl F. Zanuck pour la Twentieth Century Fox, Harry Cohn pour la Columbia. Il aura été tout autant difficile de réduire les caractéristiques du studio à un style « maison », à une « griffe » Universal. Même si la présence de certains collaborateurs techniques et artistiques assurait parfois la permanence de certains traits. Les gestionnaires se suivent mais Universal aura été aussi l’endroit où d’avisés directeurs de production, d’inspirés producteurs exécutifs, auront écrit quelques-unes des riches heures d’Hollywood.

Entre formules et innovations permanentes

Choisir entre la routine prudente et un cinéma plus prestigieux, trouver la formule magique qui remette régulièrement les finances à flot et assure des recettes à court et moyen terme, afficher d’authentiques ambitions artistiques, tels ont été les mouvements contradictoires qui ont traversé l’histoire d’Universal. Une sélection de cent titres, mêlant les grands succès du studio, les dates importantes, les œuvres majeures mais aussi curiosités et incunables, permettra peut-être de se rendre compte des tensions et mouvements qui ont défini l’activité de la compagnie. Dès les premières années d’existence du studio, se posait la question de limiter la production aux œuvres modestes (des westerns en deux bobines pour un public provincial et rural) ou de s’engager dans la réalisation de ces films de prestige qui allaient rester dans l’histoire du cinéma : Blind Husbands/Maris aveugles et Foolish Wives/Folies de femmes d’Erich Von Stroheim, The Man Who Laughs/L’Homme qui rit de Paul Leni, Phantom of the Opera/Le Fantôme de l’opéra de Rupert Julian. On verra aussi comment un studio sans véritables stars fera des monstres, sous l’impulsion de Carl Laemmle, Jr., dont on mesurera désormais l’apport véritable, les vedettes de films qui définiront un nouveau style d’épouvante gothique avec Dracula, Frankenstein, la momie et le loup-garou, sous la direction de cinéastes comme James Whale, auteur maison, Tod Browning, Karl Freund et d’autres. Et c’est sous la signature de John Stahl qu’Universal produira quelques-uns des plus beaux mélodrames du cinéma américain dans les années trente.

À côté des filons, dont les succès feront parfois la fortune du studio (les films musicaux avec Deanna Durbin, les pitreries d’Abbott et Costello, les tribulations de « Francis, le mulet qui parle  », les « orientaleries  » avec Maria Montez), se sont imposées des œuvres ambitieuses sous la férule de producteurs comme Walter Wanger (Saboteur d’Alfred Hitchcock), Joan Harrison (les films signés de Robert Siodmak), Mark Hellinger (Les Tueurs de Robert Siodmak, La Cité sans voiles de Jules Dassin) dans les années quarante. On verra aussi à quel point les années cinquante furent une grande décennie, avec les westerns signés Anthony Mann et produits par Aaron Rosenberg, les films de Jack Arnold produits par William Alland ou Albert Zugsmith, qui donneront leurs lettres de noblesse à la science-fiction cinématographique, les bouleversants « women’s pictures » de Douglas Sirk produits par Ross Hunter ou Albert Zugsmith encore.

Universal aura produit aussi, dans les années soixante et soixante-dix, les derniers chefs-d’œuvre d’Alfred Hitchcock. Le studio aura également ouvert ses portes aux nouveaux prodiges du cinéma américain moderne, qui créeront le système des blockbusters contemporains. Steven Spielberg, Ron Howard ou Ridley Scott, incarneront une transformation en profondeur du système et le règne sans partage des cinéastes-producteurs.

Jean -François Rauger

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Destiny
Julien Duvivier, Reginald Le Borg , 1942
Je 27 déc 19h00   HL

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