La caméra de « Microcosmos » rejoint les collections de la Cinémathèque

Laurent Mannoni - 11 janvier 2017

À l'issue de leur visite à l'exposition De Méliès à la 3D : La Machine cinéma, les réalisateurs de Microcosmos, Claude Nuridsany et Marie Pérennou, ont décidé de donner à la Cinémathèque française la caméra qui a servi à la réalisation de ce film et de Genesis.

Arriflex 35 III, ayant servi au tournage de Microcosmos

La caméra est une Arriflex 35 III, munie d'objectifs spéciaux, originellement montée sur un bâti très lourd (pour la stabilisation), et capable d'obéir à la moindre commande, grâce à la technique informatisée du motion control qui donne des mouvements doux et minuscules. La caméra peut filmer en grande vitesse, de façon à ralentir certains gestes rapides. Des systèmes optiques permettent de plonger dans l'herbe ou le calice des fleurs. Un studio a été construit pour abriter cette installation et la longue cohorte des acteurs de Microcosmos (1996) : fourmis, araignées, chenilles, papillons, bien que bon nombre de plans aient été aussi réalisés en plein air, dans le cadre magnifique de l'Aveyron. Le film regorge de séquences incroyables, d'une poésie à couper le souffle (accentuée par la musique de Bruno Coulais) : les gouttes de pluie qui tombent par exemple, et qui évoquent l'effet d'un bombardement à l'échelle des insectes.

Voici leurs commentaires au sujet de l'exposition : « Nous nous sommes roulés dans les rouages de la "machine cinéma" avec grand plaisir et émotion. Cette grande salle dégage un parfum à la fois familier et indéfinissable (c'est le propre des parfums). C'est vivant, intelligent, stimulant et en même temps, c'est un peu comme un mausolée dressé en hommage à un grand amour défunt. Le Taj Mahal du cinéma argentique, de ses pompes et de ses œuvres, de ses gélatines aux images tremblantes et granuleuses et de ses rouages déliés et savants (sa chair et ses os)... Les machines bourrées d'électronique et de spaghettis de fils électriques que sont les caméras numériques sont "au coin" et c'est bien fait. La mélancolie du Mépris accompagnée par la musique élégiaque de Delerue est une introduction grandiose, une forme de "messe de requiem". Et à l'autre bout, Gravity (bien que scandaleusement numérique) avec les lunettes 3D est bluffant. »

La caméra de Microcosmos rejoint les collections techniques de la Cinémathèque française, qui comprennent plus de 6 000 appareils anciens, dont la caméra de Georges Méliès, celle de Jean-Luc Godard, de Jean Rouch et autres grands créateurs du cinéma.


Laurent Mannoni est directeur scientifique du patrimoine à la Cinémathèque française. Il est l'auteur d'une vingtaine d'ouvrages sur les débuts du cinéma et a été le commissaire d'une douzaine d'expositions.