Le fonds d’archives Amos Gitai : une pensée créatrice à explorer

27 février 2014

Par conviction personnelle et artistique, le cinéaste Amos Gitai a donné à la Cinémathèque française à partir de 2007 un ensemble d'archives papiers, photographiques et audiovisuelles brutes, volumineuses et riches.

L'exposition « Amos Gitai, architecte de la mémoire » repose sur l'exploration des archives du cinéaste. Il y a chez Amos Gitai une sensibilité et un goût évidents pour le travail de la mémoire et de l'Histoire. C'est ainsi qu'il relève régulièrement dans son œuvre, à des moments différents espacés sur de longues périodes, le travail du temps sur les hommes et sur les territoires, notamment dans ses trilogies comme celle de Wadi (1981), Wadi dix ans après (1991) et Wadi grand Canyon (2001).

Le traitement de ces archives a débuté en 2009 et s'est achevé début 2013. Durant ce long processus, l'épouse du réalisateur, Rivka Gitai, puis le réalisateur lui-même ont accompagné l'identification des documents. Leur apport a été précieux car le fonds comprend un grand nombre de documents multilingues, reflets des langues écrites et parlées par les techniciens et collaborateurs attitrés du réalisateur, notamment l'anglais ou le français pour les scénaristes (Stéphane Lévine, Marie-José Sanselme), l'hébreu bien sûr, mais aussi l'italien, l'allemand, le russe.

Ce fonds est aujourd'hui divisé en trois parties. Les deux premières regroupent les archives respectivement liées aux films documentaires et aux films de fiction. Cumulées, elles totalisent les 90 premières boîtes d'un fonds qui en compte 122 (soit environ 12 mètres linéaires). La dernière partie rassemble les dossiers attachés aux autres activités d'Amos Gitai : le théâtre, les expositions, l'architecture, l'édition puis le rayonnement international de son œuvre dans la presse et sa présence dans les festivals.

La spécificité de cet ensemble d'archives et donc de la méthode de travail qu'il révèle réside dans la part importante que prend la recherche dans la préparation des films chez Amos Gitai. A la fois en termes quantitatifs mais aussi dans la variété des disciplines explorées. Cette phase est au service de l'homme et en même temps elle lui permet déjà de délimiter l'idée et la forme du film en devenir. Débordant d'un film sur l'autre, – au point que l'un peut-être la matière préparatoire du suivant -, cette documentation devient une chambre d'échos qui met en évidence les résonances entre documentaires et films de fiction (la prostitution dans Bangkok-Bahreïn puis dans Promised Land), la récurrence de lieux et de territoires (les gorges de Haïfa appelées wadi ou encore les piscines de Salomon), et les citations d'auteurs et textes utilisés comme une « ritournelle » intérieure tel l'Ecclésiaste : "Il y a un moment pour tout, et un temps pour chaque chose sous le ciel"...

Ce travail consacré à la préparation et à la recherche n'a pas pour but de fixer un plan millimétré du film en devenir, mais de fournir au cinéaste la matière nécessaire pour en élaborer les éléments essentiels : sujet, composition et éléments de l'histoire, scénario... En cela, ce fonds d'archives invite moins à voyager sur les traces d'un film ou d'un projet particulier que sur celles d'une logique, d'un univers, d'une pensée.

Le fonds photographique Amos Gitai numérisé : une base iconographique exceptionnelle

En même temps que ses archives papier, Amos Gitai a confié à la Cinémathèque française les photos de ses films qui étaient conservées par sa société de production AGAV Films, soit plus de 1300 images documentant une trentaine de films, complément iconographique indispensable aux archives.

Ce fonds est aujourd'hui entièrement numérisé et consultable sur les écrans de la Bibliothèque du film. Il est constitué de trois grands ensembles : photographies de plateau et de promotion (560 documents), photographies de tournage (450), photographies de repérages (308). Ces photographies de travail constituent une documentation exceptionnelle, avec beaucoup d'images rares. Le fonds sera complété à l'avenir par celui du producteur Laurent Truchot, qui nous a également confié les très nombreuses photographies relatives aux films d'Amos Gitai qui étaient en sa possession.